Pour bénéficier des services de restauration, les
étudiants au campus social de l’Université Cheikh Anta Diop de Dakar
(Ucad) forment une queue . De loin, on peut apercevoir ces files
d’étudiants longues comme une journée sans pain. Ici, on peut perdre 30
minutes avant d’être servi. Bousculades, bagarres, injures sont les
maîtres mots.
Il est 19 heures. A côté du pavillon A, non loin du terrain de
basket, se tient une file indienne. Les étudiants, tickets et cartes en
mains se bousculent dans tous les sens pour avoir accès à la salle à
manger. Devant le tableau noir, dressé devant le Resto, nous pouvons
lire : menu du jour : « poisson avec frits ». Un plat très prisé des étudiants, explique Oumar Fall, étudiant en 3ème
année à la Faculté des Sciences juridiques et politiques de l’Ucad. A
quelques mètres du rang, deux étudiants se battent. Motif, l’un d’entre
eux veut forcer le passage. Il affirme qu’il ne peut respecter la
queue. « J’ai faim. Je n’ai rien mangé depuis ce matin », exprime-t-il pour justifier son acte. On le laisse néanmoins partir tout en se moquant de lui.
Les pas rythmés des étudiants, les bousculades, les discussions
donnent l’impression d’être au marché. Oumar Diop, de taille moyenne,
blouson noir, casquette vissée à l’image des rappeurs, grandes oreilles,
est pressé d’être servi. Pour passer du temps, il écoute les
informations sur Rfi à l’aide de ses écouteurs branchés aux oreilles.
Sur la longue attente, il déclare : « Nous sommes obligés de faire
avec les moyens du bord. Nous sommes nombreux, on doit s’armer de
patience pour être servi. La queue, c’est la règle ici au campus, aussi
bien pour se rendre aux toilettes que pour accéder aux services de la
bibliothèque ». A côté de lui, quelques étudiants n’ont pas le
fameux sésame : le ticket. Ils se promènent et demandent le concours de
leurs camarades. C’est le cas de Lamine Diallo qui en manque et qui n’a
encore moins d’argent. On lui emprunte un pour le dîner de ce soir. Très
content, il évoque : « C’est la solidarité entre camarades ».
Devant la porte d’entrée du resto, deux messieurs et une femme
vérifient les tickets, scrutent minutieusement les cartes avant de
leslaisser passer. Mais ce soir, Ibrahim Baldé n’a pas de chance. Il se
présente avec la carte de son camarade. Il ne réussit pas à s’échapper
de la vigilance des maîtres des lieux : les contrôleurs. Après une
longue explication, il est autorisé tout de même à y accéder. Même
scénario pour ces deux autres étudiants maliens arrêtés pour n’avoir pas
présenté leur quittance. Après des chaudes discussions, d’un ton ferme,
le chef de contrôle déclare : « on vouslaisse exceptionnellement entrer pour ce soir ». Démoralisés, ils prennent place dans la salle à manger.
A l’intérieur, c’est une autre ambiance. Les bruits des assiettes,
la détermination des serveurs, l’impatience des étudiants,
l’insuffisance des tables créent parfois des tensions. Ce soir, certains
d’entre eux prennent leur repas à même le sol, faute de places. Ils
sont contents de remplir leur ventre. Fatou Bah, avec un grand humour
affirme : « C’est le meilleur plat des étudiants. Je compte faire un second tour. La nuit est longue ». Après avoir mangé, ils quittent tranquillement le resto.
Manger au restaurant principal de l’Ucad reste difficile. Il demande la patience et une maîtrise des nerfs.
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