jeudi 24 avril 2014

Budget participatif : un baromètre de démocratie et de bonne gouvernance



Le Centre de Recherche Populaire pour l’Action Citoyenne (Cerpac) est un réseau national qui a son siège à Guédiawaye. Il s’active sur les problématiques de la gouvernance locale et de la participation citoyenne à la gestion des affaires publiques principalement dans la banlieue de Dakar. Pour une co-élaboration et mise en ouvre communes des budgets participatifs municipaux, le Cerpac s’emploie  à expérimenter, depuis 1999, une sorte de dialogue entre les élus locaux, les populations et les techniciens que sont les organisations non gouvernementales(ONG) qui jouent un rôle d’interface entre les mairies et les populations.
Le budget participatif est avant tout un programme politique de gauche réfléchi par les partis des travailleurs du Brésil pendant 20 ans avant son expérimentation  en 1996 dans ce pays. Les instruments pour mesurer le budget participatif varient d’un continent à un autre. Le choix de la banlieue de Dakar par le Cerpac pour l’expérimentation du ce budget n’est pas fortuit mais plutôt stratégique. En réalité, la banlieue, soutient Sidiki Daff, président du cette structure, est le concentré des problèmes qu’il ya au Sénégal. Elle est une zone périurbaine c'est-à-dire qui a un pied dans le monde rural et un autre dans le monde urbain.
C’est ainsi que le séminaire international de Dakar de 1999 convoqué par le Cerpac avait  permis d’introduire pour la première fois le budget participatif au Sénégal. Ce séminaire  tenu à Guédiawaye avait réuni des Brésiliens dont le secrétaire chargé du budget participatif de Porte Alegre, des communes françaises (Fontaine), de Bruxelles et des communes sénégalaises. Durant deux jours, les participants ont échangé des expériences sur le budget participatif. Au sortir de ce séminaire, beaucoup d’élus locaux sénégalais avaient adhéré à ce budget. Mais de nos jours, la réalité en est toute autre. « Dans nos mairies, il y a des pratiques très anciennes caractérisées par l’opacité érigée en  méthodes de gestion. Or le budget participatif, c’est fondamentalement la transparence et l’échange d’informations dans les manières de faire », déplore M. Daff.
 Par ailleurs, la participation citoyenne découle elle-même de la déclaration universelle des droits de l’homme de 1948  qui consacre que : « Toute personne a le droit de prendre part à la direction des affaires publiques soit directement, soit indirectement par des représentants choisis par les populations ». Ainsi, pour une effectivité de la participation citoyenne, celle-ci ne doit pas se limiter pas à la simple consultation ou à l’information des citoyens de ce que font les élus locaux. Elle suppose l’élaboration  et la mise en ouvre communes des budgets et programmes municipaux ainsi qu’un  contrôle de l’ensemble du processus. « Depuis que nous sommes arrivés à la tête de la ville, nous avons choisi la méthode participative. Nous avons initié la grande réunion que tout Guédiawaye connait maintenant qu’est la journée d’étude municipale, destinée à la préparation du budget. Au cours de cette journée, nous invitons toutes les entités de Guédiawaye avec une question : comment voulez-vous que votre budget soit pour l’année prochaine ? », rassure le maire de Guédiawaye, M. Cheikh Sarr. Sur la question de la participation des populations à l’élaboration du budget participatif dans cette municipalité, la mairie et le Cerpac n’ont pas parlé le même langage : « Aujourd’hui, les budgets municipaux au Sénégal sont élaborés intra-muros par les élus essentiellement. En aucun moment, les populations participent à l’élaboration du budget encore moins à son contrôle. Tout est laissé entre les mains de la structure municipale qui gère, qui dépense mais qui ne rend pas compte », s’insurge M. Daff.
Capacitation citoyenne
Au cerpac, on parle rarement de formation citoyenne mais plutôt de capacitation citoyenne. Convaincu que les populations sont porteuses de connaissances et d’expérience, le Cerpac ne privilégie pas la formation qu’il estime une démarche directive. Elle opte plutôt pour la capacitation qui consiste à aider ces populations à mieux booster, capitaliser et valoriser leurs propres connaissances et expérience. Dans ce cas, le Centre  joue plutôt le rôle d’accoucheur de savoir et non de transmetteur de savoir.
Dialogue et échanges d’information entre les acteurs
« On n’est dans un dialogue de sourd entre des acteurs qui interviennent dans un même espace et qui, lorsqu’ils se rencontrent c’est en terme de conflit et non de dialogue », regrette le président du Cerpac. Selon lui, l’absence de mécanismes appropriés  de communication entre les acteurs dans l’échange et le partage  de l’information crée une sorte de paradoxe. C’est pourquoi, dit-il, qu’il y a au Sénégal un phénomène hyper-important auquel les gens n’y font pas attention très souvent. « Autant les populations se substituent à l’Etat et aux mairies  dans la construction des services publics relevant de l’Etat (des citoyens s’organisent et cotisent pour construire des écoles, des infrastructures sanitaires… lorsque l’Etat est défaillant) autant ces populations refusent de payer l’impôt », constate-t-il. Cette manière de faire des populations est en réalité une prédisposition à la participation et traduit le manque de dialogue entre les pouvoirs publics et les citoyens.
En réponse à la mairie de Guédiawaye qui affirme avoir mis en place un site d’information pour informer les citoyens de ses activités, le Cerpac se dit indigné et estime que «  Quand on a à faire à des populations majoritairement analphabètes, le meilleur moyen d’information demeure la radio communautaire ».

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